Fermes de Dombes

Sur les vastes étendues du plateau de Dombes à l’habitat dispersé, on rencontre souvent de grosses fermes isolées au milieu des terres cultivées, ou des petits hameaux comportant deux ou trois maisons. Même si certaines ont plus de 300 ans, les fermes très anciennes sont rares, la plupart ayant été édifiées à la fin du 19e et au début du 20e siècle.

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Construire en terre

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Saint-Trivier-sur-Moignans, Ferme de la Cote, détail d'un mur en galets, carrons et terre.

Faute de pierre de construction, le matériau le plus utilisé dans l’habitat rural est la terre crue et plus rarement, compte tenu de son coût plus élevé, la terre cuite par la mise en oeuvre du carron. Hormis dans le nord de la Dombes, il y a peu de bâtiments en pans de bois à remplissage de torchis ou de briques, ce mode de construction étant plutôt réservé à la Bresse.

La terre à pisé est extraite au plus près du chantier sous la terre végétale, au fur et à mesure des besoins. Elle donne à l’habitat rural, lorsqu’il n’est pas enduit, sa chaude couleur ocre plus ou moins jaune suivant la région. Peu coûteux car on trouve l’argile sur place (le trou creusé devenant ensuite une mare), très isolant et respirant, il a bien résisté au temps malgré sa fragilité apparente.
L’outillage et la mise en oeuvre sont simples, mais comme toute technique traditionnelle, tout est dans le savoir-faire. Au printemps, par temps sec, il s’agit de former des lits de terre entre deux planches appelées "banches", placées de chaque côté du mur à construire. Le maçon travaille la terre d’abord en la "frassant" c’est-à-dire en l’aérant avec une griffe, puis en la tassant à l’aide d’un "pisou" pour qu’elle soit comprimée régulièrement. Une fois une première banchée remplie, il peut décoffrer et poursuivre le travail en continu. Pour solidifier l’édifice, les "banchées" sont liées entre elles par de la chaux blanche coulée horizontalement, verticalement ou en oblique.

Les angles du bâtiment sont renforcés avec des briques, les encadrements de fenêtres avec du bois, les linteaux de porte avec de la pierre et arc de décharge en briques. Une fois le mur terminé, demeurent visibles les trous carrés à distance régulière qui sont les emplacements des barres de bois servant à ancrer le coffrage dans le mur.
Pour assurer la stabilité de la construction et l’isoler de l’humidité, des soubassements sont élevés à environ un mètre au-dessus des fondations. Ils sont constitués de briques et de galets roulés assemblés en arêtes de poisson en Dombes, ou de rangées de pierre plus près du Val de Saône. Les façades sont protégées de la pluie par les auvents des toitures débordantes et sont souvent enduites à la chaux.


Loger les hommes et les bêtes

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Francheleins, ferme à cour fermée de Grange Neuve

Le premier rôle de l’habitation est de loger hommes et bêtes en les protégeant des rigueurs du climat. Les bâtiments sont longs et bas avec de petites ouvertures. Bien orientés nord-sud, ils gagnent une protection efficace contre les vents d’hiver.

La ferme à bâtiment unique comprend une simple habitation flanquée d’un appentis d’un côté et d’une grange-écurie de l’autre. Les fermes sur plan en L ou en U partiellement ouvertes sur les champs, étaient tenues par deux ou trois ménages ne disposant que d’une ou deux pièces d’habitation. Les bâtiments d’exploitation restent bas et de taille modeste. La cour, le puits, les étables, les soues à porcs et le pressoir, lorsqu’on cultivait la vigne, étaient partagés.

Dans les grandes fermes à cour fermée, les bâtiments se dissimulent derrière de hauts murs aveugles, prenant alors une allure de forteresse. On accède à la cour par un portail de bois accolé à une petite porte piétonne ; les plus anciennes ont conservés de beaux portails voûtés en plein cintre à encadrement de pierre parfois daté, signalant l’aisance des propriétaires. Elles correspondent à de grandes exploitations appartenant autrefois à des bourgeois ou des nobles, tenues par d’importants fermiers employant de nombreux domestiques nécessaires à la vie de l’exploitation. L’habitation  comprend le logement au rez-de-chaussée composée d’une vaste pièce de vie servant à la fois de cuisine, de séjour et même de chambre à coucher. A l’unique étage, le grenier desservi par un ou deux escaliers extérieurs, occupe les combles. Façades et escaliers sont abrités par un toit débordant.

Les bâtiments d’exploitation (étable, écurie, loge à porcs, poulailler, remise) sont disposés autour de la cour. Le four dans lequel est cuit le pain de toute la maisonnée, parfois commun à plusieurs maisons, est détaché de l’ensemble pour éviter les risques d’incendie.

Les maisons étaient équipées d’un puits servant pour une ou plusieurs maisons mitoyennes. Bâti en briques, parfois en pierres de taille et les plus récents en béton, certains sont complètement fermés dans un petit édifice maçonné en forme de dôme, appelés "puits-obus" ou "puits en bonnet", d’autres couverts d’un petit toit de tuiles à deux pans.

Carrés, octogonaux ou sur pilotis, les pigeonniers, nombreux du côté du Val de Saône, se dressent à proximité de la ferme. Les plus anciens datant de l’ancien Régime se rencontrent principalement sur des domaines appartenant autrefois à la noblesse ou à la bourgeoisie locale. Ils présentent les mêmes matériaux de constructions que les fermes.



Les mots à comprendre

Pisé : technique de construction séculaire utilisant la terre argileuse crue coffrée pendant qu'elle est encore humide et tassée par couches superposées.

Ailleurs sur le web

A lire sur le sujet

Terre de Dombes, Guide rhônalpin du patrimoine méconnu, Patrimoine rhônalpin, 1987
Ouvrage en consultation au Centre de documentation - Service Patrimoine culturel

 

Le pisé – entretien et restauration, CAUE de l’Ain, 1983

Sauvegarder, réhabiliter, reconvertir un pigeonnier (Bresse, Val de Saône), CAUE de l’Ain, 1999

Fiches-conseils Réhabilitation de l’architecture – Bresse – Val de Saône, CAUE de l’Ain, 2003