Génissiat le "Niagara français"

Le barrage de Génissiat, inauguré en août 1948, doit sa notoriété à une réalisation exceptionnelle : première coupure du Rhône en 1937, chantier mené pendant la guerre, symbole de la reconstruction et poste de contrôle de l'ensemble des aménagements du Haut-Rhône. Avec ses 500 000 m3 de béton, sa hauteur de 104 mètres de retenue d’eau et, sous sa muraille, ses six turbines ultra modernes, le barrage devient dès 1949 l’usine hydroélectrique la plus importante du pays.

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Barrage de Génissiat sur le Rhône

Le Rhône et la fée électricité

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Les pertes du Rhône et le barrage des forces motrices

À l’aube du 20e siècle une nouvelle perspective s’ouvre pour le fleuve Rhône : "la houille blanche", c’est-à-dire la production d’électricité à partir de barrages implantés sur son cours.
Le premier sera établi par deux américains à dès 1871, à Bellegarde-sur-Valserine. Les eaux du Rhône, captées rive droite, déviées dans un tunnel, faisaient tourner des turbines solidaires de grandes roues, dans une usine dite "Usine de la Jonction" au confluent du Rhône et de la Valserine (1871). La distribution de l’énergie produite était réalisée au moyen d’un transport télémécanique ou télédynamique. Néanmoins, la Compagnie générale de Bellegarde essuya un échec entrepreneurial  et les limites techniques de l’hydromécanique conduisirent à rechercher d’autres solutions qui n’émergèrent qu’une dizaine d’années plus tard. A l'initiative de Louis Dumont, une nouvelle installation, entre en fonctionnement en février 1884, celle-ci fournit de l'énergie électrique en continu avec des turbines et non plus par télémécanique. Cet ensemble proto-industriel est aujourd’hui noyé par la retenue de Génissiat.
Avec le barrage de Cusset, véritable outil de développement pour l’agglomération lyonnaise, le Rhône apparaît dès lors comme une formidable ressource potentielle. Les projets fleurissent, dont celui de Léon Mähl qui propose dès 1908 à la ville de Paris de lui fournir l’électricité à partir d’un barrage implanté à Génissiat. Naît ici l’idée d’un ouvrage, obstruant la vallée en son point le plus étroit et noyant les fameuses pertes du Rhône.


L’inauguration du plus grand barrage d’Europe

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Barrage de Génissiat

L'inauguration du barrage de Génissiat, en janvier 1948, par le ministre de l'Industrie Robert Lacoste, marque une étape importante de l'effort collectif de reconstruction du pays dans l'immédiat après-guerre. Le choix est fait d'un vaste programme d'équipement hydroélectrique qui doit permettre à la France de se dégager de sa dépendance charbonnière, ressource rare et largement importée. L'hydroélectricité est alors fortement valorisée comme énergie nationale et fait l'objet d'investissements considérables, notamment par le biais de l'aide du plan Marshall.
Célébré comme le plus grand barrage d'Europe lors de son inauguration, Les travaux ont débuté en 1937 sous l'égide de la Compagnie Nationale du Rhône (CNR). Cette société a été créée en 1933 sous l'impulsion du sénateur de l'Isère Léon Perrier et d'Édouard Herriot, maire de Lyon et plusieurs fois Président du Conseil sous la Troisième République. La CNR est une société d'économie mixte qui regroupe à l'origine les collectivités territoriales riveraines du Rhône (ainsi que le département de la Seine comme client) et des industriels pour mettre en œuvre un programme global d'aménagement du fleuve. Le gigantesque chantier de Génissiat, conçu par les architectes Laprade et Bazin (concours 1938), débute en 1937. En 1939 a lieu la coupure du Rhône mais les travaux sont rapidement interrompu par la seconde guerre mondiale. Le chantier redémarre en 1945, avec les besoins de la reconstruction et la priorité absolue accordée à l'hydroélectricité par le gouvernement français ; 3000 ouvriers sont alors mobilisés. Le barrage achevé fin 1947 est mis en eau en janvier 1948. Génissiat est par ailleurs la tête de pont d'un vaste programme d'aménagement du fleuve qui s'est poursuivi jusqu'aux années 1960. Il fonctionne avec le barrage aval de Seyssel mis en service au début des années 1950.

Vidéo archives INA Actualités 1948


Un chantier prodigieux

Le barrage-usine de Génissiat franchit le Rhône entre Franclens en rive gauche et Génissiat (commune Injoux-Génissiat) en rive droite, dont il porte le nom. Le barrage est de type poids, c'est-à-dire que son poids s’oppose à la force de l’eau. Il permet une chute utile de 64,5m. Il culmine à 104 m. Une centrale électrique Léon Perrier y est adjointe. Le débit du fleuve est amené aux groupes de production par six conduites forcées. Il comporte deux évacuateurs de crues : un canal à ciel ouvert, situé en rive droite et un canal souterrain, en rive gauche. L'ouvrage comprend également six ponts. Génissiat abrite le poste de contrôle de l'ensemble des aménagements du Haut-Rhône.

Le site est classé patrimoine industriel du 20e siècle.

Inventaire Rhône-Alpes Les aménagements du Rhône


En aval le barrage de Seyssel

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Seyssel, centrale hydroélectrique, pont -barrage de Seyssel en construction, sept. 1946 / Roger Henrard

L'aménagement hydroélectrique de Seyssel se situe à une dizaine de kilomètres à l'aval du barrage-usine de Génissiat, avec lequel il fonctionne en étroite collaboration. Le barrage de Seyssel a en effet pour rôle principal de réguler le débit du Rhône sortant du barrage-usine de Génissiat, en assurant la compensation des écluses de ce dernier, ceci afin d'empêcher les inondations des villes de Seyssel Ain et Seyssel Haute-Savoie. L'usine-barrage a été construite à partir de septembre 1946 et fut mise en service en 1951-1952. La construction de l'usine hydroélectrique, qui devait d'abord être différée, a été entreprise en même temps que celle du barrage, à la demande de la Direction de l'Electricité. Sa production annuelle s'élève à 150 millions de kWh. Elle dessert 39 communes de Haute-Savoie.

L'aménagement de la chute de Seyssel comprend un barrage de 101 m de débouché installé dans le lit mineur et une usine de 86 m de long sur la berge de la rive gauche. C'est un ouvrage de basse chute dont la hauteur de chute maximale est de 8,25 m. Le barrage peut retenir 5,5 millions de m3 d'eau.



Plan et itinéraire

À lire sur le sujet

Les gorges perdues du Haut-Rhône : de la Suisse à Génissiat, Dominique Saint-Pierre. M&G, Musnier-Gibert DL 2013.

Adresse

Centrale Léon Perrier
Rue Marcel Paul
01200 Injoux Génissiat