Sélignat à Simandre-sur-Suran
La chartreuse fondée au 13e siècle, brûlée en 1636 par les troupes franc-comtoises, est reconstruite en totalité à la fin du 17e siècle. Dans ce bel ensemble architectural niché dans une cluse encaissée du Revermont, sont accueillis aujourd'hui des laïcs désireux de vivre dans l'esprit de saint Bruno.
Une histoire mouvementée
La chartreuse, bâtie au pied d’une source qui rejoint la vallée du Suran, s’appelait à l’origine "maison du val saint Martin". Son histoire est connue par les écrits de Dom Devaux. En 1201, le seigneur Hugues de Coligny sur le point de partir pour la Terre sainte, donne aux chartreux établis à Seillon tout ce qu'il possède à Sélignat pour qu’ils y bâtissent un monastère. Il meurt en Macédoine et la fondation voulue par le chevalier sera reprise une dizaine d'années plus tard par son frère. Pillée et brûlée en 1636 par les troupes franc-comtoises, la chartreuse devra être reconstruite en totalité à la fin du 17e et au début du 18e siècle.
Les chartreux, chassés par la tourmente révolutionnaire, en profitent peu. On connaît la disposition des bâtiments par un tableau du 18e siècle en perspective cavalière. La chartreuse passe alors en mains privées et sert de carrières de pierres. Rachetée en 1866 par l'ordre des chartreux et remise en état, ils y restent jusqu'en 1901. Transformée en hôtel en 1906, en hôpital durant la première guerre mondiale, puis en colonie de vacances, c'est en 1928 que la propriétaire madame Tardy en fait don généreusement à l'ordre afin que les moines s'y réinstallent. La communauté y demeure jusqu'en 2001, date à laquelle les religieux rejoignent la Grande Chartreuse.
Les bâtiments d’entrée et de la cour intérieure témoignent des constructions des 17e et 18e siècles, les autres bâtiments ayant été reconstruits à partir de 1866. La façade néoclassique de l’église domine la première cour. Les cellules des moines entourent le grand cloître.
La chartreuse ne se visite pas.
Un trésor dispersé
Les bâtiments et une partie du mobilier de la chartreuse sont vendus comme bien national en 1793, et le reste par le propriétaire des lieux en 1804. Quelques éléments du beau mobilier baroque sont visibles dans les églises de Treffort, Germagnat, Chavannes-sur-Suran, Saint-Denis-les-Bourg, Saint-Just ou encore Montfort dans le département du Jura.
Les boiseries et stalles, œuvres du sculpteur lyonnais Claude Régnier (1724) font aujourd’hui la beauté du chœur de l’église de Treffort. De style Louis XIV, elles présentent de grands panneaux ornés de vases sacrés et rinceaux, et de neuf scènes de la vie de saint Bruno, fondateur de l’ordre, inspirés des tableaux peints par Eustache Lesueur en 1645 pour la chartreuse de Paris.
Le grand groupe sculpté de l’Agonie attribué au sculpteur Jean-Marie Fyot, visible dans l’église de Chavannes-sur-Suran, devait orner le maître-autel de l’église de la chartreuse. Composé de trois anges et du Christ agenouillé, cet ensemble sculpté, certainement doré à l’origine, illustre une scène de la Passion du Christ relatée par l’évangéliste Luc. Jésus se retire pour prier dans le jardin du mont des Oliviers à Jérusalem avant son arrestation à la suite de sa dénonciation par Judas. Un ange lui offre un calice à boire, symbole de l'acceptation de sa destinée.