Eglise Saint-Michel de Nantua

L'église de Nantua faisait partie des grandes abbayes bénédictines de l'Ain avec Ambronay et Saint-Rambert-en-Bugey. Son portail présente un témoignage des plus belles sculptures romanes du département. Elle abrite une œuvre majeure d'Eugène Delacroix, célèbre peintre romantique français.

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De l'abbatiale à l'église Saint-Michel

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Place d'Armes, façade de l'église abbatiale

Il est impossible de dater précisément l'origine de l'abbaye, la bibliothèque et toutes les archives ayant été brûlées à la Révolution. La légende raconte qu'elle aurait été fondée au 7e siècle par saint Amand.

La première évolution majeure connue à l'époque carolingienne est le transfert de l'abbaye en 852 par Lothaire Ier à l'évêque de Lyon, ce qui lui fait perdre son autonomie. En 877, de retour d'Italie, l'empereur décède dans la cité voisine de Brion ; il est enseveli dans l'abbatiale avant son transfert à Saint-Denis. La possession provisoire de la dépouille de Charles le Chauve, petit-fils de Charlemagne, lui permet de s'assurer ainsi une certaine prééminence.

Peu après l'an Mil, le monastère passe sous la dépendance de l'abbaye bénédictine de Cluny. L'église est alors reconstruite et modifiée à plusieurs reprises. Suite aux périodes de prospérité des 12e et 13e siècles, l'abbaye tombe sous la tutelle des sires de Thoire-Villars, puis de la Maison de Savoie. On parle d’un laisser-aller de la vie monacale qui conduit à l'abandon de la vie communautaire en 1443. Le dortoir, le réfectoire, l'infirmerie et la salle du chapitre cèdent la place aux vastes demeures des dignitaires issus des familles nobles. Ils maintiennent désormais la vie religieuse et procèdent à des commandes artistiques pour l'église. Le prieur Pierre de la Forest enrichit l'abside de vitraux et fonde la « chapelle ferrée » au nord. Au début du 16e siècle, son neveu et successeur introduit le style Renaissance dans l'arc d'entrée à caissons de sa chapelle funéraire Notre-Dame-de-Pitié, aujourd'hui chapelle Sainte-Anne ; sa voûte nervurée à liernes et tiercerons est une véritable prouesse technique. 

A la Révolution, les bâtiments sont dévastés, l'église pillée, le clocher et la tour de la croisée du transept démolis. En 1791, l’ancienne église priorale Saint-Pierre devient paroissiale et passe sous le vocable de saint Michel. En 1803, un grave incendie ravage les toitures et les bâtiments conventuels. Il faut attendre 1850 pour voir s'élever le nouveau clocher, reconstruit dans le style clunisien.

L'église est classée au titre des monuments historiques depuis 1907.


Délicatesse de la sculpture romane

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Portail ouest, chapiteaux et linteau sculptés (détail).

Selon l'historien de l'art Raymond Oursel, « la sculpture romane brille d’un dernier feu au fond du Bugey ». Le grand portail occidental, percé dans une façade austère, frappe en effet par la virtuosité de sa sculpture, malgré les visages bûchés. Le linteau affirme le sacrement de l'Eucharistie avec une représentation de la Cène, le dernier repas que le Christ partagea avec ses douze apôtres avant son arrestation. La densité des plis aux arêtes vives des vêtements et de la nappe se détachant sur un fond de vaguelettes, est l'œuvre d'un artiste talentueux dont le style dénote l'influence bourguignonne. Leurs noms latins sont gravés dans la pierre au-dessus d'eux. Selon l'iconographie classique, le tympan bûché à la Révolution présentait le Christ en majesté entouré des quatre évangélistes ; des scènes de la vie de la Vierge sont visibles sur les chapiteaux : Visitation, Annonciation et Purification. Les détails finement ciselés se retrouvent dans la seule voussure subsistante et dans les tailloirs des chapiteaux aux longs entrelacs dans lesquels picorent des oiseaux.

L'église, au plan en croix latine, présente un sol qui s'élève au fur et à mesure de l'avancée vers le chœur.  L'abside polygonale est  curieusement flanquée de quatre absidioles à fond plat. La présence des bas-côtés, rare dans les églises romanes de l'Ain, a nécessité l'élévation de douze imposants piliers de calcaire à noyaux carrés flanqués de colonnes qui délimitent les travées. Plus sobres que ceux du portail, les chapiteaux sont ornés d'autant de décors végétaux différents avec quelques têtes humaines cachées dans les feuillages. Certains ont conservé des traces de leur polychromie d’origine.



Envie de visiter ?

Visite libre et gratuite.

Pour tout renseignements, contactez l’Office de Tourisme Haut-Bugey

Espace Trois Lacs
14, rue du Docteur Mercier
01130 Nantua
Tél. 04 74 12 11 57

Plan et itinéraire

Les mots à comprendre

Liernes et tiercerons : nervures décoratives d'une voûte sur croisée d'ogives la divisant en plusieurs segments.

Bûché : provient de « bûchement », terme de maçon qui signifie l'action d'enlever une partie de la pierre en saillie.

Voussure : partie courbe qui surmonte une porte ou une fenêtre.

Tailloir : nom donné dans l’architecture médiévale à la partie supérieure qui couronne et renforce le chapiteau d’une colonne.

Abside : espace situé à l'extrémité Est de l'église, son plan est le plus souvent semi-circulaire mais peut-être polygonal ou plat.

Absidiole : petites absides, servant de chapelles, situées à l'extrémité des bas-côtés dans une église romane.

 

A voir aussi dans ce site

Un Delacroix à Nantua


Peint en 1836 par Delacroix (1798-1863), chef de fil de l’école romantique française, le tableau « Saint Sébastien soigné par Irène », orne le chœur de l’église de Nantua. Représentatif de la période de synthèse du peintre, il demeure aujourd’hui un des fleurons du patrimoine nantuatien.

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A lire sur le sujet

Le prieuré clunisien de Nantua. Analyse morpho-spatiale et organisation de l’espace ecclésial, Nicolas Reveyron, Documents d’Archéologie en Rhône-Alpes-Auvergne, 2013.

Le monastère et la terre de Nantua - Histoire et documents, Pierre Blanc, Paul Cattin, Jean-marie Plouin, Les Amis de la Michaille, Bellegarde 2016.