Les autochromes de Tournassoud
Les 4 plaques photographiques autochromes, objets de ce « Coup de cœur », font partie d’un ensemble beaucoup plus vaste de plusieurs milliers de plaques, dites « plaques de verre », réalisées par Jean-Baptiste Tournassoud entre 1910 et 1935, et aujourd’hui conservées dans la collection publique départementale des Musées de l’Ain.
L’histoire d’une collection unique en France
Le commandant Jean-Baptiste Tournassoud, originaire de Montmerle-sur-Saône, photographe des Armées pendant la guerre 14-18, photographe personnel de Clémenceau, a réalisé quantité de documents selon les techniques issues des recherches de son époque sur son département : l’Ain.
L’histoire de cette collection unique remonte à celle d’une rencontre et de tractations entre Agnès Bruno, alors conservateur départemental (1986-2007), et la petite-fille du commandant Tournassoud, Mick Micheyl. À l’époque, les plaques de verre de la collection personnelle de Mick Micheyl sont sur le point d’être vendues à Los Angeles aux États-Unis. La qualité et le métier incontesté du photographe donnent à ces plaques un double intérêt documentaire et artistique pour le Département de l’Ain.
Afin d’éviter une dispersion à l’étranger, un choix de 1 500 plaques, rigoureusement sélectionnées en fonction de leur état de conservation et de l’intérêt artistique et ethnographique est alors proposé à l’acquisition. Le Département de l’Ain décide de se porter acquéreur et achète la collection pour la somme de 135 000 francs en 1986. L’aide financière du Fram (Fonds régional d’acquisition pour les musées) est sollicitée par le Département comme appui à la politique qu’il veut mener en matière ethnographique.
Les autochromes Tournassoud de la collection départementale des musées
Aujourd’hui, la collection départementale des musées est riche de 4 500 plaques photographiques de Tournassoud, dont seulement 61 autochromes. Ces derniers constituent un corpus rare. L’ensemble fragile de la collection, rigoureusement conservé, a fait l’objet d’un plan de numérisation conduit en 2004 avec l’aide de l’État, ce qui permet sa valorisation régulière dans les expositions permanentes ou temporaires des musées départementaux.
Parmi les sujets les plus couramment représentés par les autochromes de la collection se trouvent : Madame Tournassoud, dite Géo (33), leur fille Juliette (6), des scènes de jeux d’enfants jouant (1 fois), des couples bavardant (1 fois), des paysages (7), des portraits d’officiers (2) et de soldats (1), des natures mortes florales (3). Des scènes de genre ou des scènes plus cocasses de bohémiens ou de saltimbanques (2) viennent compléter ce panorama riche et savoureux.
Nature morte et pictorialisme
Très courantes depuis l’Antiquité grecque et égyptienne, les natures mortes sont souvent représentées sur une table. Les objets dépeints sont liés par une tension physique et métaphorique. Malgré leur nom, l’impression de mouvement et de dynamisme de la composition sont les aspects clés de ces œuvres. Un éclairage dramatique est une composante fréquente des scènes de nature morte, surtout dans le contexte photographique.
Le pictorialisme est un mouvement esthétique de la fin du 19e siècle et du début du 20e siècle, dans lequel la photographie imite la peinture impressionniste grâce au flou artistique, aux surfaces texturées et à l’expression des émotions du photographe. Les images pictorialistes sont donc souvent très dramatiques ou théâtrales, et font de la photographie une technique artistique égale à la peinture. Pour obtenir des effets visuels spécifiques, elles étaient généralement filtrées au moment de la prise de vue, puis teintées en chambre noire.