Chapelle Sainte-Madeleine à Bourg-en-Bresse

L’hospice Sainte-Madeleine installé dans les faubourgs de la ville de Bourg en 1826 pour accueillir 150 malades possède dès 1828 une première chapelle, remplacée par celle bénite par Mgr Devie en 1839. Ce n’est qu’en 1933 que Mère Ambroise donne l’autorisation d’édifier l’actuelle chapelle plus belle et plus vaste, intégrée dans les bâtiments de leur Communauté.

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Nef et bas-côtés

Une construction en deux temps

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Clocheton en béton du chevet

Georges Curtelin (1899 – 1968), alors jeune architecte lyonnais connu en architecture religieuse est choisi pour construire la nouvelle chapelle sur le même emplacement que la précédente. Il est l’une des figures principales de l’architecture religieuse à Lyon dans la période de l’entre-deux guerres avec l’architecte Louis Mortamet et l’abbé Pierre Thomas à l’origine de la construction de la madone et du carillon du Mas Rillier à Miribel. Il vient d’achever l’église du Sacré-Cœur du Teil en Ardèche et la chapelle néogothique du monastère de Bethléem à Paray-le-Monial en Saône-et-Loire (1931-1933), celle-ci présentant beaucoup de similitudes avec Sainte-Madeleine.

Le chantier débute en mai 1933 pour s’achever en juillet 1935. Il est mené d’une main de fer par Mère Amboise qui ne tolère aucun retard et impose ses idées. C’est le cas pour le petit clocher octogonal fermé en béton qui doit remplacer le campanile ajouré qu’avait prévu et dessiné Curtelin. Elle exige que ne soit pas interrompue la célébration du culte ce qui nécessite une construction en deux temps : l’abside, les chapelles rayonnantes et la croisée du transept en premier lieu, suivie de la construction de la nef et des bas-côtés. La façade principale sur rue est maintenue, mais élargie et recomposée dans le style art déco. Le chevet à l’architecture très dépouillée se signale par des baies géométrisant le style gothique et employant la brique pour créer des motifs décoratifs très épurés.

En 1973, les sœurs cèdent l’ensemble de la propriété à l’ORSAC que le Département de l’Ain acquiert en 2001 pour y installer progressivement ses services. La chapelle est propriété de la Ville de Bourg-en-Bresse depuis mars 2015. Labellisée « Patrimoine du 20e siècle », elle est inscrite au titre des monuments historiques depuis 2013. Les constructions qui la bordaient au nord sont détruites en 2013 pour bâtir la nouvelle cité judiciaire de Bourg-en-Bresse.


La méthode et le style Curtelin

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Chapiteau cubique art déco

L’architecte conçoit et dessine non seulement les plans de l’édifice, mais l’intégralité du mobilier et de l’orfèvrerie qu’il fait réaliser ensuite. Tout en laissant une certaine latitude aux artistes, il cherche à obtenir un ensemble équilibré et homogène. Son style dépouillé est très influencé par l’esprit de l’architecte bénédictin Dom Bellot et par les réalisations des frères Perret et de Tony Garnier qui fut son professeur pendant quelques mois. S’inscrivant dans les tendances de l’art déco en vogue à cette époque, il prône la géométrie, la symétrie et la sobriété. Il recherche la simplicité et, comme Dom Bellot, géométrise les baies gothiques à partir de formes simples divisant les ouvertures en compartiments géométriques. Il décline à l’infini les carrés, triangles ou octogones, le globe surmonté d’une croix et sa discrète signature, les trois rangs de stries horizontales.

La construction allie la brique creuse utilisée aussi pour son effet décoratif et le béton dont il soigne la finition. Recherchant l’économie, Curtelin a recours à une légère charpente métallique couverte de tuiles mécaniques. A l’intérieur, les matériaux employés sont nobles, tout étant réalisé « pour la plus grande gloire de Dieu » : des marbres abondamment présents, notamment pour les autels, mais aussi du chêne, du fer forgé et du bronze doré.


Une architecture intérieure homogène

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Chapelle de la Vierge

Dans toutes les chapelles qu’il a construites, Georges Curtelin s’applique à ce que le chœur et le maître-autel soient particulièrement visibles de toute l’assemblée. A Sainte-Madeleine, il construit à cet effet une abside polygonale plus large que la nef avec sept chapelles rayonnantes en déambulatoire ouvertes sur le chœur, réservées aux malades.

La nef principale est séparée des deux bas-côtés par des colonnes cylindriques en pierre marbrière polie à chapiteaux cubiques décorés de carrés, sans base. Un petit escalier au revers de la façade permet d’accéder à la tribune. Deux autels latéraux sont consacrés l’un à la Vierge et l’autre à saint Joseph, patron de la congrégation des religieuses. Les cinq verrières zénithales éclairant la nef dessine une grande croix latine lumineuse composée d’une mosaïque de verres colorés de forme géométrique.

Curtelin conserve néanmoins l’allure générale de style classique de la façade d’origine sur rue avec son fronton triangulaire interrompu en pierre de taille et ses pilastres monumentaux. Il modernise les colonnes du portail, agrandit la rosace et ouvre des verrières latérales dans les bas-côtés.


Une collaboration artistique féconde

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Lustre de la nef et éclairage zénithal

Conçue et dessinée dès l’origine dans les moindres détails par Curtelin, la décoration est le fruit d’une riche collaboration avec les meilleurs artistes lyonnais du moment : son ami le peintre-décorateur Jean Coquet qui travaille à tous ses chantiers d’architecture religieuse (première collaboration en 1930 à l’église de Chazelles-sur-Lyon) et le sculpteur Joseph Belloni qui s’illustre à la basilique de Fourvière à Lyon, deux artistes catholiques partageant le même sentiment religieux. Coquet réalise les vitraux figuratifs et le décor peint à fresque des chapelles latérales, Belloni la statue en bronze de la Vierge posée en façade extérieure et les deux bas-reliefs consacrés à la vie de saint Joseph à l’intérieur.

C’est à l’abbé La Mâche qui dirige l’Ecole d’apprentissage supérieur de Lyon avec lequel il collabore souvent, que Curtelin demande de fabriquer l’intégralité du mobilier en bois et en fer forgé : les lustres, le siège du célébrant, la crédence et les confessionnaux.

L’orfèvre Amédée Cateland, successeur d’Armand-Calliat, réalise le tabernacle, plusieurs garnitures d’autel, la châsse qui contient les reliques de sainte Flavienne et les vitrines abritant un ensemble de reliquaires provenant des anciennes chapelles.



Les mots à comprendre

Tabernacle : abrite le ciboire contenant les hosties consacrées.

Garniture d’autel : ensemble d’orfèvrerie posé sur l’autel, composé d’une croix et de six chandeliers assortis.

Châsse : coffre, vitrine ou boîte reliquaire en verre et métal contenant d’infimes fragments du corps d'un saint ou d’objets ayant été à son contact

Sainte Flavienne : la châsse contient les reliques d’une jeune vierge martyre qui arrivent des catacombes de Rome le 3 octobre 1843 à la demande de l’aumônier de Sainte-Madeleine.

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Protéger une « œuvre d’art totale » au titre des monuments historiques : la chapelle Sainte-Madeleine de Bourg-en-Bresse, chef-d’œuvre de l’Art déco dans l’Ain

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