Neuville-les-Dames : histoire et patrimoine

Le village de Neuville est riche de son histoire et de son patrimoine. La place du Chapitre avec ses maisons canoniales témoignent d’une vie religieuse très présente dès l’origine et les restes d’une « poype » font le lien avec son emplacement primitif. Une histoire est à découvrir au fil des rues et ruelles de Neuville. 

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Les origines du village

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Poype de Neuville-les-Dames ou motte castrale.

En 1009, une notice de l’abbaye de Saint-Oyen de Joux mentionne un village « Novavilla » dont l’église est dédiée à Saint-Maurice, situé près du fond de Luiseys. Dans ce texte, les moines de ce village demandent à l’abbé de Saint-Oyen, dont ils dépendent, de posséder la justice, ce qui leur est accordé.

Il existe un recueil des chartes de Cluny, daté de 1103, où Bérard de Luiseys est cité ; son château est édifié entre Chatillon et Vandeins.

Deux textes relatant des translations de reliques (Saint-Thaurin en 1158 et Saint-Oyen en 1183) évoquent la présence de deux prieurés, le premier pour les femmes et le second pour les hommes.
Outre les deux prieurés, une poype atteste de l’ancienneté du village

Cette motte castrale se localise à 600 mètres  à l’ouest du village actuel et sur la rive gauche du Renon. Un castrum appartenant à la famille de Luyseys y trône (toujours visible en 1650 d’après Guichenon) ainsi qu’une chapelle sous le vocable de Saint-Jacques. Elle est encore évoquée en 1736 sur un bail pour la location du moulin de Garambourg. Deux voies antiques de circulation passaient à proximité de ce site (Hannezo) ; l’une reliant Chatillon à Bourg et l’autre de Chatillon à Vandeins. Quelques fouilles ont été réalisées mais n’ont pas livré de secrets. Il est supposé que le village primitif soit établi aux alentours de cette poype.

En 1184, l’empereur romain Frédéric Barberousse prend sous sa protection l’abbaye de Novavilla et la chapelle du castrum, sans doute située sur la poype de Luiseys.

Au cours du 13e siècle, un incendie dévaste le village. Les reliques de saint Trivier, nichées dans l’église furent détruites ainsi que les prieurés. Un nouveau village (celui d'aujourd'hui) voit le jour sur la rive droite du Renon, à 800 mètre à l’est, dans un quartier que l’on nomme "Basse-Bresse". Des maisons à colombages et encorbellements sont les témoins de cette nouvelle installation. L’église Saint-Maurice et le prieuré sont reconstruits sur les places actuelles du Chapître et des Chanoinesses.


Des religieuses bénédictines aux chanoinesses

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Place du Chapitre et hôpital

Le prieuré des religieuses bénédictines dépend de l’abbaye de Saint-Claude dont un prieur et quelques moines gèrent les intérêts matériels et les recrues des moniales. Une prieure a tout de même en charge la vie courante du cloitre et les offices. Les novices, souvent très jeunes, doivent faire preuve de leur noblesse et sont éduquées pour leur vie future par une "tante".

Les règles bénédictines s’assouplissent peu à peu. Très vite les religieuses s'installent dans des maisons individuelles où elles peuvent recevoir leur famille. Les pièces communes de ce prieuré, réfectoire et dortoir, se dégradent. Le cloître fermé par deux grilles est constitué d'un jardin, un parc, des vignes, un four, deux églises et des maisons canoniales.

En 1710, le couvent de dames est supprimé et le prieur devient seigneur de Neuville. Ce chapitre est sécularisé en 1755 ce qui permet d’accueillir des novices de familles plus prestigieuses (Sophie de Grouchy, future madame de Condorcet ; les princesses de Saxe, les familles De Brosse, les demoiselles de Tencin, de Beaurepaire, ...). Les chanoinesses deviennent comtesses par décret du roi Louis 15 de 1757.

Aujourd'hui, la trace de ces Dames ne perdure que par les maisons canoniales, les halles, le moulin de Garambourg, deux places et une grille de portail. 


Les maisons canoniales

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Fronton de la maison Beaurepaire

Ce sont des maisons à étages, avec de grandes façades grises percées de hautes fenêtres classiques et d'œils-de-bœuf. En général elles comprennent un rez-de-chaussée et un étage surmonté de combles, les formes en sont irrégulières car elles épousent les particularités du terrain. 
Les églises fermaient la place. Un maillage d'allées dallées permettait aux chanoinesses de se rendre aux offices de chez elles. Sur 25 maisons comptabilisées lors de la disparition du chapitre à la Révolution, aujourd'hui il n'en reste qu'une vingtaine.

La maison Beaurepaire

Cette très belle maison est située à l'est de la place du Chapitre. Elle a été aménagée par Marie-Gabrielle de Beaurepaire qui fut secrète en 1777 et nommée doyenne en 1782.

Au-dessus de la porte d'entrée, sur un fronton, les armes de Jeanne de la Coste, précédente occupante, sont bien conservées : une couronne comtale correspondant à son rang qui, à part la tête du griffon, a survécu au temps ainsi qu'à la Révolution.

La maison est somptueuse, avec sa magnifique rampe d'escalier qui s'inscrit dans une montée triangulaire très originale avec un beau corps en fer forgé et décorée d'un parquet en étoile et du portrait de la vielle dame en chanoinesse.


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Façade principale de la maison de Brosses de Gevigney

La maison de Brosses de Gevigney

La plus belle de Neuville ; elle occupe à elle seule tout le coté nord de la place de l'ancien monastère.

On l'appelle improprement le ''château‘‘. Cette demeure a l'élégance un peu solennelle des hôtels particuliers des nobles familles seigneuriales et parlementaires contemporaines de Louis 15. La façade est simple, avec un avant-corps coiffé d'un fronton classique ou s'ouvre sur le palier un escalier à double révolution conduisant à une belle porte cintrée dotée d'un heurtoir.
Le bâtiment est bâti en forme de trapèze.
La belle couverture de tuiles en écailles couleur de roses de la toiture mansardée a disparu vers 1910 . Un pavillon à tourelle a brisé le noble mouvement de l'ensemble au 20° siècle sans toutefois lui enlever tout son cachet.
À l'arrière, la façade sur le parc est encadrée de deux pavillons avec un balcon en fer forgé.

Elle est construite vers 1730 par Charlotte de Brosses de Montfalcon, qui y meurt en 1755.
Elle est achetée après la Révolution par l'ex chanoinesse Adélaïde de Berbis, devenue Madame Jussieu de Saint Julien. Elle réside à Neuville de 1768 à 1848, et y meurt à 100 ans.

Dans cette maison se trouve un beau salon de réception avec un parquet en étoiles d'époque, quelques consoles de bois doré, une belle cheminée, un portrait de la dernière chanoinesse en habit avec le ruban bleu liseré de rouge portant la croix des chanoinesses.
On accède au second étage par un très bel escalier de service en chêne inscrit au titre des monuments historiques. Dans le vestibule un escalier en pierre avec une très belle rampe en fer forgé monte au premier étage. Un carrelage aux fleurs de lys recouvre le sol du rez-de-chaussée. 

Ce sont les descendants d'Adélaïde de Berbis qui vivent actuellement dans cette bâtisse.


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Maison Damas-Cormaillon

Les maisons Damas-Cormaillon, Chastenay de Lanty, Ricée et Saxe et Salignac de la Mothe

Ces quatre maisons ont abrité plusieurs nobles chanoinesses dont les princesses de Saxe. Elles sont construites vers 1760 avec le concourt de l'architecte Zola pour le compte des dames de Damas et Chastenay de Lanty. Elles sont dressées en alignement à gauche de l'ancienne porte d'entrée du chapitre pour remplacer les jardins du prieur et de l'aumônier.

Les deux premières maisons symétriques et contiguëes s'ouvrent sur la nouvelle place, deux escaliers sont accolés et la dénivellation du terrain permet d'aménager de l'autre coté en contre bas un rez-de-chaussée à demi-enterré où les dames installent leurs services, cuisine, cave et bûcher.
De nombreux propriétaires vont s'y succéder mais elles ont gardé grande allure dans leur élégante simplicité et renferment de belles boiseries et cheminées.

L'abbé Sauvage les achète en 1829, et les cède en 1838 aux sœurs de la congrégation de Saint Joseph (la chapelle des sœurs est installée au premier étage, un clocheton y est construit mais sera démoli vers 1974) ; En 1844 les sœurs ouvrent une école privée pour 68 filles en hiver et 25 en été ainsi qu'un pensionnat pour six d'entre elles. Un hôpital et une pharmacie complètent cet ensemble afin de soigner la population.
La pharmacie ferme en 1888 suite aux plaintes de médecins estimant que les sœurs ne sont pas suffisamment qualifiées pour délivrer les soins et les médicaments aux indigents. L'école quant à elle ferme en 1904.

L'immeuble est racheté aux sœurs par la Commune. Une entreprise de confection de bleus de travail, les établissement Vulcains puis Laffont, s'y établit en 1961. Les locaux sont transformés en ateliers.
50 ouvrières y travailleront, dans des conditions difficiles, les salaires étant payés en fonction du rendement. L'activité cesse en 1987.

La maison de  retraite l'Aubier prend possession des lieux et accueillera 30 résidents jusqu’en 2018.


La rue du Cani

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Place des chanoinesses

À gauche des maisons Choiseul-Beaurepaire, une petite ruelle permet de rejoindre les routes de Chanoz-Chatenay et de Vonnas. Son nom de "rue des quatre-chemins", attribué au 18e siècle, est dû au carrefour marqué d'une croix. Elle est percée tardivement lorsque le couvent devenu chapitre n'était plus qu'un souvenir. Les portes sont encore fermées la nuit, et au fond de la rue un grand portail de fer marque la fin de l'enceinte du chapitre.

Comme l'espace est restreint dans la cour, et, devant l'afflux de candidates après 1750, plusieurs maisons canoniales sont construites dans cette rue dont celles de Mesdames de Forbin, Dupac de Bellegarde et de Madame de Beaurepaire. Ces maisons, n'ayant pas de jardins, servaient peu. Un grand mur aveugle dissimule une autre maison, construite après 1750 par Madame de Laurencin-Beaufort. Elle appartient aujourd'hui aux descendants de la chanoinesse de Berbis.

La rue du Cani n'est pas sans évoquer les chenils des chanoinesses qui aiment à participer aux chasses à courre du Comte de Montrevel, propriétaire à l'époque d'une des plus grandes meutes de France.

Cette rue accueille la première poste avant qu'elle ne soit transférée au centre du village.

D’autres maisons canoniales ornent cette place dont la maison de Crangeac, sans doute la plus ancienne comme en témoigne ses pans de bois, ou bien la salle capitulaire (incontournable dans un prieuré) et la maison du Breuil.


Le moulin de Garambourg

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Moulin Garambourg et sa cheminée

Le moulin de Garambourg appartenait au Prieur et a été transmis aux Dames ainsi que tous les domaines en 1710. Situé sur un bras du Renon, il possède trois roues datant d'au moins 1664 : deux pour la farine et une pour l’huile. Il était amodié en farine.

Plus tard une machine à vapeur augmente son rendement. La haute cheminée est le dernier témoin de cette installation.

Il fonctionna jusqu’à la dernière guerre. C’est aujourd’hui une demeure privée.


Les halles

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Les halles de Neuville-les-Dames

Les chanoinesses achètent une maison en 1734 et en transforment une partie en halles en 1739 (date inscrite sur la poutre de la ferme). Les assises de la justice, comme les assemblées des habitants se tiennent sous la halle ainsi que les marchés. Certains prétendent que cette bâtisse pouvait servir de prison temporaire.

Au 19e siècle, un particulier la loue comme entrepôt.

À partir de 1907 la commune l’emploie commegarage pour le corbillard, caserne des pompiers et local de rangement.


Le lavoir

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Lavoir de Neuville-les-Dames

En 1876 le conseil municipal sous la houlette du maire Monsieur Dubois, demande à l’architecte Abel Rochet d’imaginer un lavoir afin que les Neuvilloises puissent y faire leur lessive.
L’entrepreneur Mazanan réalise ce bel édifice en pierre de taille avec à l’intérieur deux foyers permettant de faire chauffer les lessiveuses. Les lavandières rinçent leur linge dans l’eau courante du Renon qui est canalisé en son centre.

L'utilisation du lavoir prend fin dans les années 1960.
Abandonné depuis plusieurs années, la municipalité demande en juillet 1998 l’aide des bénévoles de l’association Concordia pour sa rénovation. En trois semaines l’équipe de volontaires retire les détritus et désensable le centre du lavoir afin que l’eau du Renon puisse à nouveau s'y écouler. Dans le même temps, les murs sont rénovés et rejointés.
Des notes de musique sont inscrites sur le mur intérieur de la bâtisse, telles qu’elles figurent dans l’antiphonaire. Elles évoquent « l’ode à la joie » écrit en 1785 par Schiller. Ludwig Van Beethoven décidera en 1820 d’inclure ces notes dans le dernier mouvement de sa symphonie n°9, adaptée pour des chœurs. Cette réalisation a été mise en œuvre par les jeunes bénévoles de l’association Concordia. Ils ont présenté le travail effectué aux Neuvillois, en organisant un concert de fin de chantier.
La rénovation se poursuit  en 2002 avec la reprise de la toiture par une entreprise locale.

L’association Fleurs et Couleurs Neuvilloises contribue à recréer l’ambiance d’antan.


Consulter d'autres ressources sur Neuville-les-Dames

 



Les mots à comprendre

Novavilla, Luiseys, Luyseys : appellations successives du village. Il fut aussi appelé au cours de l'histoire Luseiaco, Novilla, Neuville, Neufville-les-Moines, Neuville-les-Comtesses, Neuville-sur-Renon...

amodier : louer contre une redevance en nature

antiphonaire : recueil de chants grégoriens des chanoinesses

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