Fête agricole de la Saint-Martin

Apparaissant au Haut Moyen-Âge, fêtée jusqu’à la fin de la Grande Guerre, la Saint-Martin était autrefois l’occasion pour les valets et les servantes de ferme de changer de maîtres et de se « louer » à d’autres. Toujours célébrée en Bresse le 11 novembre, elle correspond encore au versement de certaines redevances telles que les baux et fermages. 

De nos jours, elle reste une fête populaire importante qui donne invariablement lieu à une grande fête foraine avec des attractions.

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Saint-Martin et traditions

La Saint-Martin est célébrée les 11 et 12 novembre en souvenir de saint Martin de Tours (11 novembre 397) et du pape Martin Ier (12 novembre)

En Europe centrale, la Saint-Martin s’accompagne de nombreuses traditions parmi lesquelles la dégustation de l’oie de la Saint-Martin, la retraite aux flambeaux et les chants de la Saint-Martin.

Ses différentes pratiques découlent de deux évènements étroitement liés. À l’époque où la chrétienté se trouvait sous l’influence de l'Empire byzantin, le jour de la Saint-Martin ouvrait la période de carême qui commençait alors le 11 novembre et qui s’étendait sur deux semaines. Le jour précédent, on festoyait une dernière fois avant de jeûner. Par ailleurs, le jour de la Saint-Martin était également le jour de la dîme. Dans le temps, on payait les impôts en nature, incluant les oies, puisque l’hiver approchait et que l’entretien des animaux durant cette période n’était possible qu’à condition que leur nombre reste restreint.

C’était aussi la date à laquelle commençaient ou terminaient les contrats de travail et à laquelle les fermages, les rétributions et les intérêts étaient échus. Aujourd’hui encore, le jour de la Saint-Martin sert de date de début ou de fin des baux, dans la mesure où ce jour correspond au début et à la fin de la période d’exploitation naturelle. C’est la raison pour laquelle le jour de la Saint-Martin était aussi appelé le jour de payement des intérêts.


Repas et chanson de la Saint-Martin

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Chanson de la Saint-Martin. Carte postale. L. Ravier, édition. Cliché F. Ballet

En général, tout commence par un bon repas comme l’indique la chanson La Fazche de la Sè Martin (La Foire de la Saint-Martin) en patois bressan :

« Mé pre bien quemèche lo féta
Alin nous zè va bien gueuto »
« Mais pour bien commencer la fête
Allons-nous en bien manger »

Ce jour-là, les domestiques mangent l’oie et goûtent le vin nouveau.

La Saint-Martin est également pour beaucoup une chanson qui a pour thème central le bouleversement de l’ordre social. Les rôles entre maître et valet sont inversés.

Ce thème est aussi largement traité en littérature, notamment au théâtre, et constitue un des principes fondamentaux du carnaval.

En Bresse, cette chanson est considérée comme l’une des chansons les plus populaires et les plus traditionnelles. De nombreuses versions en sont proposées, on en compte au moins sept. 

Au comique caractéristique, la louée est au cœur du texte chanté. En tenant compte de la part de vérité et celle de l’imaginaire, ce dernier est très instructif : il dépeint la vie menée autrefois par les paysans et décrit la réalité sociale des domestiques au cours des siècles derniers.


La louée

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Bourg. La foire. Carte postale. Louis Montbarbon, édition.

La louée ou " foire aux domestiques " correspond à une ancienne pratique d'embauche qui permettait de louer des bras (ouvriers agricoles, femmes de maisons, femmes de ferme...) et qui a perdurée jusque dans les années 50. La louée se pratiquait chaque année essentiellement à deux périodes : à la Saint-Jean (24 juin) pour les travaux des champs et à la Saint-Martin (11 novembre) pour les travaux d'hiver et de printemps.

Après avoir rencontré leur maître et reçu leurs gages, les domestiques se rendent à la louée, foire à l’embauche à ciel ouvert sur les places des villages, où leurs futurs maîtres viennent les examiner. Sur la louée, le saisonnier énumère les places qu'il a occupé, tandis que l'employeur vante les avantages à travailler pour lui. Rémunération, repas, conditions y sont discutés avant que le contrat soit "signé" par une poignée de main.

En Bresse, le chef-lieu Bourg-en-Bresse a progressivement centralisé la louée. D’une région de France à l’autre et selon les époques, la date de la louée varie. Chaque village devait pouvoir décider de sa propre date : Saint-Etienne-du-Bois le 5 novembre, Marboz le 25 octobre.

 


Les Zets et Zettes

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La San Martin, Zet et Zette. Carte postale. Cliché JB Tournassoud

Le lendemain de la louée, les Zets et les Zettes, noms donnés aux jeunes gens et jeunes filles de ferme, diminutifs de Joseph et Josette, profitent de leur seul véritable jour de « liberté ».

Ils se rendent à la grande vogue (fête foraine) de Bourg-en-Bresse en se donnant le petit doigt comme l’exige la coutume.

C’est l’occasion d’acheter des marrons, de faire quelques emplettes de lingerie et de découvrir les nombreuses activités animées par les blanquis, tenanciers de baraques foraines, tels que les arracheurs de dents, les Hercules, les phénomènes...